Où l'on voit que Londres et Paris s'emploient à ne pas injurier l'avenir en attendant que la Grande-Bretagne revienne dans l'Union
Mais alors pourquoi le Brexit ? A l’issue, hier, du sommet réunissant la Première ministre britannique et le président français à Sandhurst, non loin de Londres, on ne pouvait pasne pas se poser la question car jamais l’entente entre les deux pays n’a semblé si cordiale. Ce n’était que sourires des deux côté, déclarations croisées sur l’indéfectibilité et l’importance des liens entre les deux pays, primordiale pour eux-mêmes et pourl’Europe, disait Mme May. Dans une pièce adjacente, les patrons des services britanniques et français faisaient le point sur une coopération bilatérale qu’Emmanuel Macron a qualifié « d’unique » et ce n’est pas tout. Les Britanniques vont remettre au pot plus de 50 millions d’euros pour mieux équiper la frontière franco-britannique située d’un commun accord à Calais. Ils vont parallèlement accélérer l’examen des demandes d’asile, surtout celles des mineurs non-accompagnés ayant de la famille en Grande-Bretagne.Au point d’irriter la presse populaire qui se déchainait hier à Londres, Theresa May n’a pas lésiné sur les gestes de bonne volonté vis-à-vis d’Emmanuel Macron et elle va, de surcroît, appuyer l’intervention française au Sahel par l’apport de trois hélicoptères de transport et de personnels non-combattants. Alors, oui, pourquoi ce divorce entre Londres et l’Union européenne alors que les deux premières puissances militaires d’Europe occidentale, la Grande-Bretagne et la France, s’entendent si bien ? La réponse est que la relation était d’autant plus tendue qu’on n’avait jamais été sûr du contrat de mariage, séparation de biens, communauté, communauté réduite aux acquêts – en l’occurrence simple marché commun ou Europe politique – et que c’est sur ce terreau qu’ont prospéré des démagogues qui ont vendu à une majorité d’électeurs l’idée fausse que la Grande-Bretagne serait plus heureuse et prospère en reprenant son indépendance. Rupture il y eut donc mais, maintenant que la procédure de divorce est engagée et que les Britanniques découvrent qu’ils devront soit négocier, comme tout pays tiers, des accords bilatéraux avec un marché européen qui leur est vital soit accepter, pour y rester, toutes les règles européennes sans plus avoir leur mot à dire sur leur définition, il y a comme un flottement à Londres. Les adversaires du Brexit repartent à l’offensive. Ses partisans sont moins triomphants et… Non, pas encore ouvertement, pas déjà, mais l’idée d’un second référendum émerge et s’il est bien peu probable qu’elle prenne corps avant le Brexit, il n’est plus du tout improbable qu’un jour la Grande-Bretagne revienne sur son départ. Alors, en attendant, avec une ardeur partagée, Paris et Londres s’emploient à préparer ce moment en se gardant d’injurier l’avenir.