Vous partez ce matin d’un échange à l’Assemblée, entre un député du RN et le ministre de l’Education,
C’était lors des questions au gouvernement, le député des Pyrénées Orientales, Louis Aliot, sur les fermetures de classes en zones rurales, reprochait à Jean-Michel Blanquer de délaisser les écoles à la campagne au profit des banlieues sur lesquelles tout l’argent public serait déversé. Il estimait que cette injustice était l’une des causes du mouvement des Gilets Jaunes. Jean-Michel Blanquer a répondu qu’il y avait, dans le département de Louis Alliot, 18 élèves par classe en moyenne, c’est-à-dire beaucoup moins qu’en banlieue. L’affirmation du conjoint de Marine Le Pen est donc fausse. Mais cet échange montre la tentative du parti d’extrême-droite de dépeindre les Gilets jaunes comme un mouvement de la France rurale et périphérique et, suivez mon regard, contre les banlieues, peuplées... de qui ? D’immigrés ! Nous y sommes ! C’est le drame du RN : les Gilets Jaunes, certes ruraux et périurbains, ne s’opposent pas, pour autant, à une partie de la population. Dans leur expression publique du moins, ils ne ciblent pas les citadins ou les étrangers. Le RN n’arrive pas à y imposer ses thèmes anti-immigration. Si des militants de l’extrême-droite tentent (comme ceux de l’extrême-gauche d’ailleurs) de coloniser le mouvement, le thème qui surnage, après 14 semaines, celui qui noircit les cahiers de doléance, domine la teneur du grand débat, c’est l’injustice sociale et fiscale. Il est assez notable que ce mouvement n’ait pas généré de bouc-émissaire... C’est unique dans les grandes démocraties qui subissent les assauts du populisme.
Les médias, les parlementaires, le président, sont quand même stigmatisés, parfois même agressés !
Oui, mais ce sont des catégories institutionnelles, pas des catégories de la population. Des détestations certes potentiellement dangereuses pour la démocratie mais politiques, pas identitaires, religieuses ou ethniques. Elles peuvent donc se traiter par des solutions politiques et institutionnelles. LFI tente aussi d’accrocher ses wagons au mouvement. Les mélenchoniens tournent depuis des mois autour du concept de populisme de gauche. Ils auraient de quoi se satisfaire de voir leurs revendications égalitaristes se retrouver très largement chez les Gilets jaunes. Avec un bémol quand même : les Gilets Jaunes, envisagent la réduction des inégalités d’abord par la fiscalité. Ils ne demandent rien au patronat, ne s’en prennent qu’à l’Etat. Aucune grève n’accompagne le mouvement. Le paradoxe, c’est que, alors que la préoccupation sociale prime sur l’identitaire, c’est le RN qui bénéficie du climat dans les intentions de vote. Sans doute du fait de l’antériorité et de la plus grande identité antisystème de la marque Le Pen. Si les partis politiques qui soutiennent le mouvement n’arrivent pas à le faire entrer dans leurs cohérences, les Gilets jaunes sont, dans le même temps, des manchots politiques comme le montre leur incapacité à se reconnaitre des représentants, à constituer une liste aux européennes, à avoir un discours cohérent, et même maintenant intelligible. Les Gilets jaunes sont au bout de leur impasse. Voilà sans doute pourquoi, chaque samedi, on ne retient plus (mais eux aussi) que leur violence.