Alors l’effet wahou ?
Pas vraiment. Emmanuel Macron change de ton. C’est un vrai mea culpa personnel, sur son attitude et sa gouvernance, sur sa perception de la France et des Français, notamment la situation sociale des retraités. Mea culpa sans doute sincère… il a bien vu l’échec qu’avait provoqué sa façon d’exercer la fonction jusque-là. Le président dit avoir perçu ‘l’épaisseur des vies des Français’... les Français voient-ils en retour une épaisseur présidentielle, après ces confessions ? C’était l’un des enjeux d’hier soir. Sur la gouvernance, c’est le retour des corps intermédiaires, élus locaux, associations ... dans le discours au moins. Sur le fond, il n’y a pas de changement d’axe. Il y a des ralentissements, des abandons (l’objectif de supprimer 120.000 postes de fonctionnaires) et des accélérations. Et puis les objectifs à atteindre n’ont officiellement plus les mêmes justifications. Une phrase est assez significative pour illustrer ‘_l’art d’être français’, _ce nouveau motto :‘nous ne devons pas nous adapter au monde mais organiser notre résistance’. Voilà un changement de discours notable ! Le macronisme de campagne était l’idée assez strauss-kahnienne selon laquelle la France devait intégrer une mondialisation dont elle pourrait profiter si elle savait s’adapter aux exigences de notre temps. Là il s’agit de résister. C’est un changement radical (presque de philosophie), de discours qui accompagne, paradoxalement, une relative stabilité de l’action. Tout l’inverse du virage de la rigueur de 1982. 82 c’était un revirement politique profond masqué par un discours qui restait bien à gauche. A l’époque, la politique avait un surmoi ! Enfin, on a pu remarquer hier quelques emprunts :‘l’humain d’abord’ à LFI et à Marine Le Pen :‘on ne peut pas être de parfaits nomades’.
Sur le fond, déception de ceux qui, dans la majorité, attendaient un virage écologiste...
L’attitude du président sur ces sujets est assez étrange... Parce qu’au fond, si l’on détaille bien son propos, il y aurait de quoi donner un peu d’espoir aux écologistes. Le conseil de défense écologique, la conférence citoyenne tirée au sort qui dès juin pourra se pencher sur des questions environnementales et faire des propositions qui, dit le président, iront sans filtres à l’Assemblée ou même pourraient être soumises à référendum, voilà potentiellement un formidable instrument d’accélération écologiste. La suppression des grands corps de l’Etat aussi ! Ce sont, pour l’instant, des freins à toute audace dans le domaine de l’environnement. Voilà qui devrait réjouir les écologistes. Mais ces mesures qui touchent des leviers de la politique ne peuvent être crédibles (et efficaces) que si elles sont portées avec un minimum de conviction. Or le président les a évoquées avec l’entrain d’une annonce de taux de TVA. Quand il parle d’écologie, il semble aussi pénétré que quand Nicolas Demorand donne des résultats de foot ! Au total, le président change sa gouvernance et ses attitudes personnelles, il ne change pas vraiment de politique... Quelle sera la répercussion de cette conférence de presse sur l’opinion ? Pour répondre avec certitude, il faudrait savoir quelle est, dans ce que lui reprochent les Français, la part de son équation personnelle et la part du contenu de la politique qu’il mène. La réponse sera partiellement dans le résultat des élections européennes.