Cette année, la Turquie d'Erdogan a interpellé des fonctionnaires, des militants de droits de l'homme et des journalistes soupçonnés d'être proche de Gulen. Erol Önderoglu est accusé de “propagande terroriste” pour avoir soutenu une campagne de solidarité avec le quotidien kurde Özgür Gündem. Il risque 14 ans de prison
La Turquie compte 250 chaînes de télé, 40 quotidiens nationaux et des milliers de radios et de journaux locaux. Les médias proches du prédicateur Fethullah Gülen, ancien allié d’Erdogan accusé d’être le commanditaire du putsch manqué, sont visés par la répression. La fermeture définitive de 102 médias a été ordonnée par décret pour «collaboration avec l’organisation terroriste Gülen». Or, certains n’ont rien à voir avec cette confrérie religieuse, comme les sites ABC Gazetesi ou Medyascope. Les médias grand public sont contrôlés à 85 % par le gouvernement ou par des milieux financiers ayant des liens étroits avec la classe dirigeante. Aujourd'hui, le journalisme indépendant n’est plus défendu que quelques quotidiens à la diffusion limitée.
150 journalistes ont été arrêtés en six mois. Erol Önderoglu en fait partie. Il est accusé de “propagande terroriste” pour avoir soutenu une campagne de solidarité en faveur du quotidien kurde Özgür Gündem. "C'est absurde plaide Erol, je soutiens chaque publication menacée, même celle des islamistes par exemple. C'est le principe de la liberté de la presse que je défends. Il encourt une peine de 14 années de prison. " Il comparaitra ce mardi 26 décembre 2017.
Depuis l’état d’urgence décrété en juillet dernier après le putsch manqué, un simple décret suffit pour fermer un média ou licencier un journaliste. Résultat : 177 médias ont dû fermer leurs portes. La justice ne cherche plus à faire la distinction entre le travail critique légitime des journalistes et une implication concrète dans le coup d’État avorté. Les plus hauts magistrats ont été démis de leurs fonctions, et les juges chargés de conduire ces procès sont souvent jeunes, sans expérience, originaires des campagnes, et, pour la plupart, assujettis au pouvoir politique.
Erol Önderoglu n'a pas peur. Il est, tout au plus, fatigué, cette fatigue qui résulte d'une forme de découragement. " Depuis des décennies on avait l'habitude que des journalistes soient emprisonnés de manière arbitraire, fassent l'objet de poursuites judiciaires systématiques. Aujourd'hui c'est le tour de la société civile dans son ensemble, le mouvement des droits humains et les journalistes critiques qui subissent ce sort". Pour autant, la volonté de défendre les valeurs qui sont les siennes, restent intactes. Il veut continuer de se battre pour la liberté de penser et de s'exprimer.